Ughetto Henri

Ughetto Henri

Henry Ughetto (ou Henri Ughetto)

(1941-2011)

La pratique artistique d’Henry Ughetto est précoce. Il commence à dessiner et à peindre à l’âge de 14 ans alors qu’il est ouvrier dans une usine et expose ses œuvres dès l’âge de 16 ans. Dans son enfance, l’artiste trouve déjà un attrait particulier aux mannequins de couturière de sa mère et les choisit comme support de ses créations.
Son œuvre est intimement liée à ses expériences et souvenirs personnels. Pour définir son art, l’artiste et ses commentateurs se réfèrent toujours au trauma de sa mort clinique le 11 août 1963, qui engendre son désir d’immuabilité et d’éternité, cette angoisse de la mort qui est à l’origine de la création des mannequins imputrescibles, nommés dans un premier temps, mannequins allégoriques. La précision comptable de l’artiste visant à combattre le temps qui passe et la mort qui s’ensuivra s’accompagne de la nécessité d’un réalisme – le corps du mannequin est mutilé et dépecé – propre à ritualiser la mort de manière concrète. Cette fascination pour la mort s’est enfin également traduite par la réalisation d’œuvres directement déclarées comme funéraires (2e guitare funéraire, 1991, Chaise funéraire, 1994) dont un monument réalisé dès 1941 par l’artiste pour sa propre mort (Monument funéraire par et pour Ughetto).

Ses œuvres majeures restent les mannequins. À partir de 1970, les mannequins d’Henry Ughetto sont recouverts de gouttes qui suivent une certaine précision et régularité. Chaque mannequin imputrescible réalisé depuis les années 1980 est tapissé de 150.000 gouttes de peinture rouge qui pour l’artiste représentent du sang et composé de 500 objets dont 300 œufs factices et 200 autres factices. Ces factices sont choisis pour leurs qualités formelle, chromatique et symbolique. L’artiste évoque, en effet, la beauté des factices de végétaux ou de fruits, la vivacité de leurs couleurs, la « sexualisation » des fruits-légumes aussi, entre ceux qui sont phalliques et agressifs et ceux dont la rondeur est de l’ordre du féminin. Quant aux gouttes, elles « fleurissent en étoiles à partir de centres : bout d’un œuf, téton d’un sein, nombril d’un ventre », et de « plus en plus belles », elles prennent « des formes de spermatozoïdes ». Leur comptage répond à plusieurs nécessités : « 1°) pour m’encourager comme le facteur Cheval comptant les 200.000 cailloux de son palais. 2°) pour donner un rythme à l’acte de peindre. 3°) pour faire le vide autour de moi et de mon acte. 4°) pour me donner un but et des limites à dépasser. » (Henry Ughetto, catalogue de Villefranche-sur-Saône, 1995, p. 17).

Les œuvres d’Henry Ughetto questionnent les rapports entre le vrai et le faux, entre le vivant (éphémère) et le non-vivant (presque éternel). L’organisation mathématique et systématique de ses compositions canalise l’énergie créatrice de l’artiste et offre à l’ensemble à la fois un foisonnement visuel et une immuabilité rassurante.
Henry Ughetto se revendique également comme un émule de l’art d’Orlan (Chapelle de Sainte Orlan, Lyon, 1984) : tourné vers la mise en scène du corps, anticonformiste et surtout profondément baroque.

(Source Institut d’art contemproain de Villerbanne/Rhône Alpes)

Henry Ughetto’s artistic practice is precocious. He began drawing and painting at the age of 14 while working in a factory and exhibited his works at the age of 16. In his childhood, the artist already found a particular attraction in his mother’s dressmaker’s mannequins and chose them as a support for his creations.
His work is closely linked to his personal experiences and memories. To define his art, the artist and his commentators always refer to the trauma of his clinical death on August 11, 1963, which generates his desire for immutability and eternity, this anxiety of death which is at the origin of the creation of rot-proof mannequins, initially called allegorical mannequins. The artist’s accounting precision aimed at combating the passing of time and the death that will follow is accompanied by the need for realism – the mannequin’s body is mutilated and dismembered – capable of ritualizing death in a concrete way. This fascination with death was finally also reflected in the creation of works directly declared as funerary (2nd funerary guitar, 1991, Funerary chair, 1994) including a monument created in 1941 by the artist for his own death (Funeral monument by and for Ughetto).

His major works remain the models. From 1970, Henry Ughetto’s mannequins were covered with drops which followed a certain precision and regularity. Each rot-proof mannequin made since the 1980s is covered with 150,000 drops of red paint which for the artist represent blood and made up of 500 objects including 300 dummy eggs and 200 other dummy ones. These dummy are chosen for their formal, chromatic and symbolic qualities. The artist evokes, in fact, the beauty of artificial plants or fruits, the liveliness of their colors, the “sexualization” of fruit-vegetables too, between those which are phallic and aggressive and those whose roundness is of order of the feminine. As for the drops, they “flower into stars from centers: the tip of an egg, the nipple of a breast, the navel of a belly”, and “more and more beautiful”, they take “the forms of spermatozoa” . Their counting meets several needs: “1°) to encourage me like the Postman Horse counting the 200,000 stones in his palace. 2°) to give a rhythm to the act of painting. 3°) to clear the air around me and my actions. 4°) to give myself a goal and limits to overcome. » (Henry Ughetto, catalog of Villefranche-sur-Saône, 1995, p. 17).

The works of Henry Ughetto question the relationships between true and false, between the living (ephemeral) and the non-living (almost eternal). The mathematical and systematic organization of his compositions channels the artist’s creative energy and offers the whole both visual abundance and reassuring immutability.
Henry Ughetto also claims to be an emulator of the art of Orlan (Chapelle de Sainte Orlan, Lyon, 1984): turned towards the staging of the body, non-conformist and above all profoundly baroque.

(Source Institute of Contemporary Art of Villerbanne/Rhône Alpes)